Menu
Libération
Interview

«Les agriculteurs plantent des oliviers n’importe où»

Article réservé aux abonnés
Gabriel del Barrio, spécialiste des processus de désertification.
publié le 2 décembre 2008 à 6h51
(mis à jour le 2 décembre 2008 à 6h51)

Gabriel del Barrio est chercheur à la station expérimentale de zones arides (Centre national scientifique espagnol, CSIC) à Almería.

La lutte contre l’aridité des sols est devenue une priorité du gouvernement espagnol. Quelle est l’ampleur de la menace ?

L’Espagne est sur la ligne de front des zones les plus arides d’Europe. Le phénomène est extrême ici, à Almería, à proximité du désert de Tabernas, le plus spectaculaire du continent, le lieu où ont été tournés tous les westerns italiens. Mais c’est une désertification dont nous héritons, un territoire qui a subi une forte érosion, et difficile à restaurer. Ce qui nous préoccupe plus, et qui est l’objet des études menées ici, ce sont les processus de désertification liés à l’action de l’homme : une désertification «en marche», et pas toujours aisément perceptible dans les cartographies du couvert végétal ou des ressources hydriques.

Un désert qui avance masqué ?

Contrairement à une image répandue, le désert n’avance pas. Il procède plutôt d’une sorte de mitage du territoire par des activités qui mettent en péril la pérennité des ressources naturelles : irrigation mal utilisée autour de Valence ou Murcie, élevage intensif en Castille, cultures intensives des oliviers en Andalousie, cultures sous serres sans contrôle dans la région…

Autour d’Almería et d’El Ejido, on produit une densité record de fruits et légumes, sous un océan de plastique. Ce n’est pas précisément l’image que l’on a du désert…

C’est pourtant l’exemple même de l’activité qui menace le sud-est de l’Espagne. En apparence, tout n’est que prospérité : productivité intense, ventes massives dans toute l’Europe, agriculteurs qui roulent en Mercedes, etc. Mais, pour l’écosystème, c’est une catastrophe. Les aquifères sont pollués, pompés à une vitesse folle par des cultures voraces