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Interview

«Cette théorie bouscule encore la place de l’homme»

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Pascal Picq, anthropologue au Collège de France, explique comment la pensé de Darwin continue d’éclairer l’odyssée de l’espèce.
publié le 27 janvier 2009 à 6h51
(mis à jour le 27 janvier 2009 à 6h51)

Grand défenseur des thèses de Darwin, Pascal Picq est maître de conférences à la chaire de paléoanthropologie du Collège de France. Il vient de publier au Seuil Darwin et l'évolution expliqués à nos petits-enfants.

La recherche de l’histoire de l’homme est truffée d’erreurs et de polémiques. Pourquoi ?

L'histoire des idées donne le sentiment que pour comprendre l'apport de Darwin, il vaut mieux contourner le cas de l'homme. Lui-même l'évite dans l'Origine des espèces, même si tout le monde comprend alors qu'il ouvre la porte. Paradoxe : celle-ci est refermée par l'émergence de l'anthropologie, puisque les premières pistes suivies par les scientifiques sont assez peu darwiniennes, voire anti-darwiniennes. La célèbre expression d'alors, «l'homme descend du singe», le montre : on admet que l'homme a un ancêtre simiesque, mais de façon péjorative, le singe représentant la honte des origines. Il est, de ce fait, rejeté dans les temps sombres et géologiques de l'ère tertiaire.

Dans cette perspective, on part de l'homme pour retrouver, à rebours, le chemin de l'hominisation. On va donc chercher des vestiges de ce qui fait l'homme : l'outil, l'art, l'habitat, les sépultures. Bref, des critères culturels. C'est seulement dans les années 90 qu'on va proposer, enfin, une définition - testable - du genre Homo, n'incluant que des caractères anatomiques précis. Malgré cela, certains continuent à étudier les caractères des fossiles - comme Toumaï [hominidé du Tchad, de 6 à 7 millions d'années, ndlr] et Orrorin [hominidé du Kenya,