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Interview

«Le bacille de la lèpre continue à circuler»

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Vision. La maladie, en recul, resurgira dans les pays du Sud où le dépistage se relâche, avertit Roch Christian Johnson, médecin et coordinateur du programme lèpre au Bénin :
publié le 3 février 2009 à 6h52
La lèpre a disparu des pays riches. Elle recule dans de nombreux pays du Sud. Est-on sur le point de l’éradiquer ?

Non. Une seule maladie a été éradiquée à ce jour : la variole, par vaccination. L’objectif «zéro personne infectée dans le monde» ne sera pas atteint, d’ici à très longtemps, pour la lèpre. En 2007, on a encore recensé 254 000 nouveaux cas dans le monde ; 118 pays sont touchés, notamment l’Inde, le Brésil, Madagascar.

Pourtant, l’idée que la lèpre est une maladie du passé circule de façon tenace…

C'est sans doute parce qu'il y a un malentendu suite à une campagne lancée dans les années 90 par l'Organisation mondiale de la santé. L'OMS avait alors annoncé qu'on allait, d'ici à l'an 2000, «éliminer la lèpre en tant que problème de santé publique». Eliminer, précisait-elle, cela voulait dire ramener la prévalence de la lèpre (le nombre de personnes infectées) à un seuil inférieur ou égal à 1 pour 10 000 habitants. Eliminer, éradiquer : la proximité des termes a un effet pervers. Elle laisse accroire que l'on peut relâcher la vigilance. Or la lutte contre la lèpre n'a de sens que sur une longue durée, car son incubation est longue. Les symptômes - des taches sur la peau insensibles au toucher - peuvent apparaître dix ans après l'infection par la mycobactérie. Une illustration : au Bénin, où la maladie est «éliminée» depuis 1996, selon les critères de l'OMS, nous observons une baisse du nombre de personnes infectées - signe de l'efficacité des traitements -, mais nous remarquons aussi, hélas, que le nombre de cas détectés chaque année reste stable. C'est la preuve que