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grand angle

Espèces d’explorateurs

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Certains traquent le puceron, d’autres le papillon. 90 chercheurs arpentent le parc national du Mercantour afin de dresser le plus vaste inventaire du vivant jamais réalisé en Europe.
publié le 8 octobre 2009 à 0h00

Leurs mœurs sont étranges : l'un parle latin en baguenaudant dans les champs, l'autre s'agenouille dans la terre, le nez au ras des fleurs, et sirote des pucerons ; le troisième ne sort jamais sans tubes au cyanure… Tous souffrent d'une collectionnite aiguë, à la limite du trouble obsessionnel. C'est une espèce en voie de raréfaction, mais si vous randonnez dans le parc national du Mercantour, dans ces vallées splendides entre la France et l'Italie, vous pourrez peut-être en observer. Ce sont des taxinomistes, des explorateurs du vivant : ils marchent dans les pas des scientifiques du XVIIIe siècle mais recourent à des techniques d'identification génétique de pointe. Héritiers d'une discipline en déshérence, mais qui connaît un regain d'intérêt à la faveur de la lutte contre l'érosion de la biodiversité, ils découvrent et décrivent les organismes vivants, les regroupent en entités (taxons) et leur donnent un nom.

Ils sont environ 90, venus de toute l'Europe, qui se relayent, de mai à septembre, pour arpenter l'espace du Mercantour et y conduire le plus vaste inventaire du vivant jamais réalisé en Europe : le «All Taxa Biodiversity Inventory and Monitoring» (1). Un recensement de la faune et de la flore entamé en 2007, qui devrait demander une dizaine d'années et va privilégier la partie plus méconnue : mousses et lichens, insectes, champignons… Avec deux objectifs : «Il s'agit d'identifier et de classer les espèces présentes, de la manière la plus exhaustive po