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Libération
grand angle

Sauve qui fouille

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Dans le sillage du canal Seine-Nord Europe s’ouvre le plus grand chantier européen d’archéologie préventive.
publié le 13 octobre 2009 à 0h00

Par gestes, l'archéologue pilote le «pelleur». Ce dernier, aux manettes d'un bulldozer de plusieurs tonnes, abaisse le godet de trois mètres de large au ras du sol. Et racle… sur un centimètre. Pas plus. Lentement, la lame ramasse le sol meuble et le dépose sur le côté. L'archéologue a déjà repéré le galet rond dégagé par l'opération. Il le soulève, souffle dessus pour le débarrasser des particules argileuses, le présente aux journalistes et annonce : «Une pierre à meuler le grain… Du néolithique !»

Sous un ciel blafard, au dessus de la plaine picarde, une équipe de l’Inrap - Institut national de recherches archéologiques préventives - travaille au plus vaste chantier de diagnostic archéologique d’Europe : 2 500 hectares, l’espace du futur canal à grand gabarit Seine-Nord Europe, destiné à relier la Seine à l’Escaut, donc au Rhin et à Rotterdam. Large de plus de cent mètres, ce canal courra sur 106 km - de Compiègne (Oise) à Aubencheul-au-Bac (Nord) - et nécessitera l’aménagement de grandes surfaces liées à ses 7 écluses, ses 3 ponts-canaux, ses 59 ponts routiers et ferroviaires et ses ports fluviaux.

Jamais, depuis l’adoption de la loi sur l’archéologie préventive en 2001, un tel espace et un tel volume de terre ne se sont offerts aux sauveteurs du passé. Une aubaine, d’autant plus que ce chantier s’ouvre dans une zone éloignée des villes et villages actuels où, de l’homme préhistorique aux paysans médiévaux, d’innombrables traces du «pays profond» dorment s