L'archéologie préventive, «c'est 90 % des fouilles depuis vingt ans», explique Jean-Paul Demoule, protohistorien, ex-président de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). Voies à grande vitesse, autoroutes, ZAC en périphérie des villes… Depuis 2001, tout cela suppose diagnostics et, souvent, fouilles. «Nous avons en permanence près de 300 chantiers en cours, petits et grands», annonce Nicole Pot, la directrice générale de l'Inrap. Le grand bazardage des Trente Glorieuses, quand la France sacrifiait son patrimoine archéologique, est révolu. Le coût : «0,2 % des dépenses de BTP, de 1 à 2 % du coût d'un aménagement du type canal», souligne Jean-Paul Demoule. Couplée aux fouilles «programmées», l'archéologie préventive a provoqué des renversements intellectuels spectaculaires pour l'histoire du territoire hexagonal, et plus largement de l'Europe, du Néolithique au XVe siècle.
«L'archéologie préventive, en offrant de vastes espaces à fouiller, s'est révélée grande tueuse. Tueuse de paradigmes historiques, de concepts… et même de faits censés être établis. La masse de données brutalement découvertes nous a libéré de la tutelle des sources écrites et fait exploser nos cadres de pensée», résume Joëlle Burnouf (médiéviste, CNRS, Paris-I). Les victimes sont en effet nombreuses : les immenses forêts gauloises ou du Moyen-Age, les défricheurs monastiques et le «blanc manteau d'églises» de l'an m