Dans leur bassin circulaire, tranquilles, les truites arc-en-ciel tournent en rond. Logique. Puis Lionel Goardon, responsable de l’élevage de cette station piscicole expérimentale à Sizun, dans le Finistère, déverse de petites croquettes alimentaires. Les truites se ruent dessus, faisant bouillonner la surface. Logique aussi ? Non. Car ces croquettes sont 100% végétales. Et la truite est carnivore, friande d’insectes et de larves.
Sourire aux lèvres, Laurent Labbé, directeur de cette station de l’Institut national de recherche agronomique (Inra), et Richard Le Boucher, jeune chercheur employé par le Syndicat des sélectionneurs avicoles et aquacoles français (Sysaaf), contemplent leur œuvre. Dans le bassin nage la troisième génération de truites sélectionnées pour ne se nourrir que d’aliments végétaux. Une expérience pionnière, publiée par une revue scientifique internationale (1).
Lionel Goardon prend une poignée de cet aliment contre-nature dans un sac. De tout petits cubes de couleur vert clair. Les portant à son nez, comme le visiteur, il demande : «Vous sentez ?» Oui, cela sent le végétal. Maïs, colza, soja. A côté, un sac propose un aliment classique, fortement dosé en farine et en huile de poisson. Et dont l'odeur ne laisse aucun doute sur son origine.
Pêcher du poisson pour nourrir du poisson, cela semble une bonne idée. Surtout si cette pêche dite minotière prélève des espèces de faible valeur commerciale (chinchard, sardines, anchois). En outre, explique Franç