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Disparition

Alexeï Leonov, le premier marcheur de l'espace s'en est allé

Le pilote russe, premier être humain à être sorti dans l’espace en combinaison spatiale pour une mission soviétique en 1965, est mort vendredi à l’âge de 85 ans.
Alexeï Leonov en avril 1974. (Photo Nasa)
publié le 11 octobre 2019 à 17h03

Il était de ces astronautes qui ont inscrit leur nom dans l’histoire de la conquête spatiale, en tête d’une page encore vierge : Alexeï Leonov, premier être humain à être sorti dans l’espace en combinaison spatiale, est mort ce vendredi à l’âge de 85 ans.

Pilote dans l'armée soviétique, il est sélectionné en tant que cosmonaute en 1960. A cette époque, l'Union soviétique a une longueur d'avance sur les Etats-Unis dans la course à l'espace, du côté de l'exploration humaine. Youri Gagarine effectue le premier vol dans l'espace en 1961, Valentina Terechkova devient la première femme cosmonaute en 1963… Les grandes premières s'enchaînent, et il faut tenir le rythme. Le programme Voskhod est lancé. Une première mission permet à l'Union soviétique de gagner la médaille du premier vaisseau emmenant dans l'espace un véritable équipage de trois cosmonautes.

Les cosmonautes en 1965. En haut, Alexeï Leonov est tout à gauche. En bas, on voit Youri Gagarine (2

e

) et Valentina Terechkova (3

e

). (Photo Alexander Mokletsov. RIA Novosti archive. CC BY SA)

Douze minutes dans l’espace

Puis Voskhod 2 doit permettre la première «sortie extra-véhiculaire» : le 18 mars 1965, Alexeï Leonov, alors âgé de 31 ans, passe dans le sas gonflable de son vaisseau et nage quelques brasses dans le grand vide spatial, habillé de sa combinaison primitive Berkut. «C'est surtout le silence qui me frappa le plus. C'était un silence impressionnant, comme je n'en ai jamais rencontré sur Terre, si lourd et si profond que je commençais à entendre le bruit de mon propre corps, a raconté Leonov à son retour. La Terre paraissait petite, bleue, claire, si attendrissante, si esseulée. C'était notre demeure, et il fallait que je la défende comme une sainte relique. Elle était absolument ronde. Je crois que je n'ai jamais su ce que signifiait "rond" avant d'avoir vu la Terre depuis l'espace.» Leonov a passé douze minutes dans l'espace, relié à son vaisseau par un filin de 4,5 mètres.

Timbres russes en l’honneur de Leonov.

A la fin des années 60, Leonov était pressenti pour devenir le premier homme à poser le pied sur la Lune, et s’est entraîné dur pour le programme lunaire soviétique –finalement abandonné, la fusée N1 n’ayant jamais réussi à décoller sans exploser.

Leonov a connu une deuxième heure de gloire en 1975. Après plus de dix ans de compétition, Soviétiques et Américains décident enfin de collaborer dans l'espace et tentent une mission commune : un vaisseau Soyouz, piloté par Leonov, rencontre en orbite terrestre un vaisseau Apollo, et les deux modules s'arriment l'un à l'autre par un système mis au point conjointement par les deux pays (un système d'arrimage «androgyne» décidé après des négociations hautement diplomatiques, car aucun pays ne voulait endosser le rôle de la prise «femelle»). Quand l'écoutille séparant les deux vaisseaux a été ouverte, Américains et Soviétiques ont pu se rejoindre, et la poignée de mains entre les commandants Alexeï Leonov et Thomas Stafford est restée historique.

La poignée de main entre Thomas Stafford (au premier plan) et Alexeï Leonov, le 17 juillet 1975 à bord du vaisseau Apollo-Soyouz. Photo Nasa

Durant sa retraite de cosmonaute, Leonov s'est impliqué dans des banques et sociétés d'investissement, a participé à l'écriture de livres sur l'histoire de la conquête spatiale, co-scénarisé un film de science-fiction, et signé plusieurs dessins et peintures de scènes spatiales que les collectionneurs s'arrachent. Au début de l'année 2019, on le disait malade, souffrant d'insuffisance rénale.

Deux fois médaillé héros de l'Union soviétique, Alexeï Leonov voit son nom «gravé en lettres d'or dans l'histoire de l'exploration spatiale», annonce, lyrique, l'agence spatiale russe Roscosmos. Les funérailles auront lieu mardi à Moscou.

Alexeï Leonov et Valery Kubasov pour la mission Apollo-Soyouz, en 1975. Photo Nasa. JSC