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Libération
Chronique «Envoyé spatial»

Le tour de Vénus en 243 jours et autres nouvelles du ciel

Cette semaine, un nouveau télescope passe le ciel aux rayons X, la rotation de Vénus est calculée précisément, Curiosity envoie une carte postale et la sonde thermique d'Insight s'enfonce à nouveau dans le sol martien avec l'aide astucieuse d'une petite pelle.
Le Grand Nuage de Magellan, galaxie voisine de notre Voie lactée, photographié le 19 octobre par le tout nouveau télescope allemand eRosita. Les rayons X permettent de voir le gaz entre les étoiles, chaud de quelques millions de degrés. Le point brillant près du centre est un reste de supernova. (Photo Haberl et al. MPE. IKI)
publié le 28 octobre 2019 à 7h26

Un nouveau télescope passe le ciel aux rayons X

On célèbre cette semaine la «première lumière» du télescope eRosita : en astronomie, c'est ainsi qu'on désigne le moment où un nouvel instrument ouvre les yeux, où les premiers photons venus du ciel viennent toucher ses capteurs. De fabrication allemande, eRosita est un télescope spatial à rayons X. Il a décollé cet été de Baïkonour (au Kazakhstan) et orbite désormais autour du Soleil, d'où il va observer le ciel en observant les rayons X. Cette gamme de longueurs d'onde dévoile des phénomènes célestes que l'œil humain n'est pas capable de voir : des étoiles à neutrons, des restes de supernova, des trous noirs supermassifs engloutissant de la matière au cœur des galaxies…

Deux des premières images prises par eRosita, en octobre 2019, montrant deux amas de galaxies en interaction.

Photo Reiprich et al. MPE.IKI

L'une des premières photos prises par eRosita, dévoilées mardi par l'Institut Max-Planck de physique extraterrestre, montre deux amas de galaxies. A gauche, on les voit comme «des structures nébuleuses, qui brillent fort en rayons X grâce au gaz extrêmement chaud (des dizaines de millions de degrés)». A droite, une autre vue des mêmes protagonistes : grâce à un traitement différent, elle souligne «les filaments qui relient les amas de galaxies, confirmant le soupçon que ces deux structures gigantesques interagissent entre elles».

La mission de eRosita devrait durer sept ans. «Nous devrions voir tous les amas de galaxies situés dans un rayon de sept milliards d'années-lumière environ, soit la moitié de la vie de l'univers», explique Johan Comparat, astrophysicien de l'équipe qui a conçu le télescope. Un relevé de ces amas de galaxies nous en apprendra beaucoup sur la façon dont l'univers est structuré.

Le chiffre : Vénus tourne en 243,0212 jours

En combien de jours une planète tourne sur elle-même ? La méthode traditionnelle pour le savoir consiste à repérer un élément reconnaissable sur sa surface, puis à compter combien de temps il met pour parcourir 360° et revenir à sa place. Ça marche bien avec Mars, Pluton, Mercure… mais pas avec Vénus, car elle est recouverte d’une épaisse atmosphère nuageuse.

Vénus vue par la sonde Pioneer Venus Orbiter, en 1979.

Photo Nasa

Alors, depuis les années 60, on essaye de réaliser ces mesures au radar, pour percer les nuages et détecter en-dessous la surface vénusienne. Les résultats tournent autour de 243 jours mais ont toujours varié un peu. Pour réduire les incertitudes, une équipe d'astronomes américains a compilé vingt-neuf ans d'observations radar (entre 1988 et 2017) et conclu avec une grande précision que Vénus tourne sur elle-même en 243,0212 jours, avec une marge d'erreur exceptionnellement réduite de 0,00006 jours. «Connaître la rotation de Vénus est d'une importance critique pour les futures missions sur cette planète, comme celles qui sont envisagées dans la prochaine décennie, rappelle le Smithsonian Astrophysical Observatory. Les incertitudes qui planaient jusqu'ici correspondent à une distance de 21 kilomètres, soit plus qu'il n'en faut pour rater un site d'atterrissage.»

Sur Mars, Curiosity envoie une carte postale…

Ça fait longtemps qu'on ne s'était pas extasiés sur un autoportrait de Curiosity, le rover martien de la Nasa débarqué sur la planète rouge en 2012. Il sait se prendre en photo lui-même grâce à la caméra installée au bout de son grand bras articulé. Ce 11 octobre, date du cliché, Curiosity visitait «Glen Etive», un lieu-dit martien où le robot a percé deux trous dans la roche pour étudier sa composition. A l'arrière-plan, on distingue le bord nord de l'immense cratère Gale où Curiosity se trouve depuis son atterrissage, et à droite, on voit le début d'un flanc du mont Sharp, qui trône au milieu du cratère.

La photo originale (sur le site de la Nasa) est d’une excellente résolution, à en imprimer des posters. Avis aux amateurs… Photo Nasa. JPL-Caltech. MSSS

… et Insight plante enfin son thermomètre

Un peu plus loin sur Mars (à 600 kilomètres environ), l'atterrisseur Insight, qui doit écouter battre le cœur de la planète, reprend du poil de la bête. Son instrument HP3 était bloqué dans le sol depuis le mois de février : il s'agit d'une sonde thermique qui devait s'enfoncer de cinq mètres en percutant le sol avec un poids, pour mesurer la température en profondeur. Mais après 30 centimètres seulement, la percussion a dû être arrêtée car la sonde n'avançait plus. Comme si elle avait rencontré un obstacle infranchissable.

Les ingénieurs de la Nasa et ceux de l’agence spatiale allemande, qui a conçu l’instrument, ont brainstormé des mois et simulé des bricolages sur Terre pour résoudre le problème. Ils ont finalement décidé d’utiliser la petite pelleteuse d’Insight pour appuyer sur la sonde HP3 et l’aider à s’enfoncer dans le sol. Et ça marche ! En fait, ce n’était pas un rocher qui bloquait la progression.

La sonde HP3, à gauche et attachée par un câble-ruban orange, s’enfonce dans le sol avec l’aide de la pelleteuse d’Insight qui fait appui.

Pour s'enfoncer, la taupe de HP3 «a en effet besoin que le sol lui oppose une certaine force de friction, explique Ciel et Espace. Celle-ci était apparemment insuffisante, si bien que le pénétrateur rebondissait plutôt qu'il n'avançait. Mais la friction due au contact de la pelleteuse semble efficace. Ainsi aidé, le pénétrateur d'InSight s'est enfoncé de 2 cm ces derniers jours».