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Plaisir marin

Les femelles dauphins peuvent aussi s’en battre le clito

Une nouvelle étude montre que les dauphins femelles ont un clitoris très similaire à celui des humaines, sensible et capable d’érection, qui fournit probablement du plaisir lors de l’accouplement et de la masturbation.
(Barcroft Media/Barcroft Media. Getty Images)
publié le 13 janvier 2022 à 16h40

On sait depuis longtemps que les dauphins sont des chauds lapins. Ils s’accouplent toute l’année sans lien avec les périodes de fertilité des femelles, s’engagent dans des activités sexuelles avant même la puberté… Ils se frottent volontiers les parties génitales, non seulement les unes contre les autres mais aussi avec le museau ou les nageoires, et ce comportement masturbatoire est observé aussi bien dans le couple hétérosexuel qu’entre mâles, entre femelles ou même avec des plongeurs de passage. Bref, la sexualité des dauphins dépasse largement la seule fonction reproductrice et on les soupçonne de s’exciter pour leur simple plaisir, comme les humains.

Organe passé à la trappe

Une étude publiée ce lundi dans la revue Current Biology va dans ce sens, en montrant que les dauphins femelles possèdent un clitoris fonctionnel. Un organe bien innervé donc très sensible, avec un corps érectile capable de se gonfler de sang, et positionné de telle façon dans le vagin qu’il est forcément stimulé par la pénétration d’un pénis de dauphin.

Et on ne le découvre que maintenant ? Eh bien, oui. Quand on sait qu’il a fallu attendre 1998 avant que le clitoris humain soit entièrement et correctement décrit (et la fin des années 2010 avant qu’il soit représenté en entier dans les manuels scolaires), il n’est pas étonnant que son homologue chez les cétacés, et chez tous les animaux en général, soit passé à la trappe. «Cette négligence dans l’étude de la sexualité féminine nous a laissés avec une image incomplète de la vraie nature des comportements sexuels», estime Patricia Brennan, principale autrice de l’étude.

Cette professeure de biologie à l’université américaine de Mount Holyoke College étudiait à l’origine l’évolution du vagin chez les dauphins. «Chaque fois qu’on disséquait un vagin, on voyait ce très grand clitoris, et on était curieux de savoir si quelqu’un l’avait déjà examiné en détail pour voir s’il marchait comme le clitoris humain. On sait que les dauphins ont des relations sexuelles pas seulement pour se reproduire, mais aussi pour renforcer les liens sociaux. Donc il était plausible que le clitoris puisse être fonctionnel.»

Rôle dans le plaisir sexuel

Avec son équipe, Patricia Brennan a donc examiné et disséqué les clitoris de onze grands dauphins (Tursiops truncatus) morts de cause naturelle, à différents âges. Il en ressort qu’il est étonnamment similaire à celui des humains, alors que le pelvis (bassin) des dauphins n’a anatomiquement rien à voir avec le nôtre. Dans le clitoris de la dauphine, qui évolue avec l’âge de l’animal pour atteindre sa forme définitive à la puberté, il y a «de grandes zones de tissus érectiles qui se remplissent de sang» et peuvent ainsi gonfler quand l’organe est stimulé. Et «la taille des nefs dans le corps du clitoris était surprenante : certains font plus d’un demi-millimètre de diamètre». Les chercheurs ont même trouvé des corpuscules génitaux, des récepteurs sensoriels présents chez l’humain dans le gland du pénis et du clitoris, et qui jouent un rôle dans le plaisir sexuel.

Tout indique donc sur le papier que l’organe fonctionne, réagit, fournit des sensations aux dauphines. «Notre étude suggère que les dauphins femelles ressentent probablement du plaisir quand le clitoris est stimulé au cours de la copulation, de comportements homosexuels et de la masturbation», conclut le texte des chercheurs américains. C’est une première strate de connaissances précieuse, faute de pouvoir observer le clitoris en «action» sur des dauphins vivants.