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Libération
Manœuvre

La sonde BepiColombo commence son inspection de Mercure

La sonde euro-japonaise effectue ce week-end le premier survol de Mercure d’une série de six, avant de s’y mettre en orbite fin 2025. Une tâche complexe, en raison de l’attraction du Soleil.
Vue d'artiste du premier survol de Mercure par la sonde euro-japonaise BepiColombo, à environ 200 kilomètres d'altitude, durant la nuit de vendredi à samedi. (Image ATG medialab. ESA)
publié le 2 octobre 2021 à 6h00

Un avant-goût de Mercure… Ce n’est pas un empoisonnement, mais une belle observation astronomique que nous promet BepiColombo ce week-end. La sonde spatiale a survolé ce samedi matin (1h34 à Paris) la première planète du système solaire, à seulement 200 kilomètres d’altitude. Un passage express, juste le temps d’engranger une collection de photos et de données scientifiques qu’elle va désormais transmettre à ses deux parents : l’Agence spatiale européenne (ESA) et l’Agence d’exploration aérospatiale japonaise (Jaxa). Samedi matin, un des comptes Twitter de la mission diffusait ainsi une première image de Mercure.

Pourquoi passer en coup de vent seulement ? Parce qu’approcher Mercure est une manœuvre complexe, qui nécessite de s’y reprendre à plusieurs fois avant de se mettre définitivement en orbite autour de la petite planète voisine du Soleil. «Il est en fait plus difficile d’aller sur Mercure que sur Jupiter, à cause de l’attraction du Soleil. Mercure est une petite planète, avec une masse faible. En arrivant à fond les ballons, on se ferait happer par le Soleil», nous expliquaient Kader Amsif et Pierre Bousquet, deux responsables français de la mission, en 2018, lorsque BepiColombo a décollé. Il faut alors envoyer le vaisseau dans un grand voyage autour du Soleil en resserrant les ellipses petit à petit, comme une bille sur les parois d’un entonnoir.

Appareils photos de surveillance

Au cours de ce trajet en forme de spirale, BepiColombo a déjà recroisé la Terre en avril 2020, puis frôlé Vénus à deux reprises en octobre 2020 et en août. Ces survols sont autant d’occasions de profiter de l’«assistance gravitationnelle» des planètes : en utilisant leur attraction, la sonde spatiale prend de l’élan, infléchit sa course vers le centre du système solaire et se cale peu à peu sur l’orbite de Mercure autour du Soleil. Avec ce premier survol, BepiColombo a ainsi gagné 2,1 km/s (vitesse par rapport au Soleil). La sonde va encore flirter avec Mercure cinq fois d’ici 2025 avant de s’y «arrêter», c’est-à-dire de se mettre en orbite autour de la planète.

Comme on connaît assez mal Mercure, ce premier survol est une occasion précieuse de commencer à étudier la planète avant l’arrivée définitive de BepiColombo en décembre 2025. La sonde n’aura malheureusement pas pu utiliser sa caméra haute définition parce qu’elle est actuellement cachée sous le module de transfert qui assure la propulsion jusqu’à Mercure. Mais BepiColombo a pu compter sur trois autres appareils photos de surveillance en noir et blanc, les «MCAM», pour mitrailler Mercure cinq minutes avant le survol et jusqu’à quatre heures après, explique l’ESA.

Surface constellée de cratères

Au moment T, au plus proche de la planète, BepiColombo sera passée à 198 kilomètres de sa surface précisément. Mais sur la face de Mercure alors survolée, il faisait nuit… C’est pourquoi l’image la plus proche ne sera prise qu’à une distance de 1 000 kilomètres. On devrait pouvoir y identifier «de larges cratères d’impact», prévoit l’ESA, qui rappelle que la surface de Mercure est constellée de cratères comme la Lune.

La sonde et la planète sont aujourd’hui à plus de 100 millions de kilomètres de la Terre – une position que l’on connaît à 500 mètres près «grâce à la précision remarquable de notre réseau de stations au sol et d’antennes réparties sur tout le globe, et aux efforts continus de notre équipe de navigation», souligne Frank Budnik, responsable de la dynamique de vol pour la mission. Il faut six minutes environ pour que les données arrivent à nos antennes terrestres, à la vitesse de la lumière. La bande passante n’étant pas terrible dans l’espace, le transfert des photos devait durer toute la matinée de samedi, une image après l’autre.