La Terre s’est dotée d’une nouvelle paire d’yeux pour surveiller ses forêts et son climat. Depuis le 29 avril, le satellite européen Biomass est en orbite et met en route ses instruments d’observation pour remplir une mission qui devrait durer cinq ans : estimer le volume de la biomasse forestière sur Terre. L’engin spatial est désormais prêt au travail, et vient de livrer lundi 23 juin ses premières photos de forêts tropicales.
«On attend de cette mission qu’elle nous permette de faire un grand saut dans notre capacité à comprendre les forêts de la Terre, en combinant l’excellence scientifique et une technologie radar de pointe», rapporte la directrice des programmes d’observation de la Terre à l’Agence spatiale européenne (ESA), Simonetta Cheli. Côté innovation, Biomass est le premier satellite à utiliser un radar capable de pénétrer sous la canopée d’une forêt pour évaluer le volume de bois qui la compose – troncs, branches et plus petites tiges encore. Le radar utilise des longueurs d’onde particulières (la «bande P») pour voir à travers les feuilles.
Avec une bonne estimation de ce volume de bois, on pourra mieux calculer la quantité de carbone stockée dans ces «puits de carbone» que sont les immenses forêts tropicales. Avec tous les enseignements qu’on peut en tirer pour l’étude du changement climatique, de la pollution de l’air, des écosystèmes…
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Parmi les premières images prises par Biomass, l’ESA publie un cliché de la forêt bolivienne et le compare avec la même région photographiée par Sentinel-2, un satellite européen un peu plus ancien et qui ne dispose pas de radar à bande P. Sentinel-2 ne voit que la canopée de la forêt avec ses nuances de vert. Biomass, lui, distingue beaucoup plus d’informations sur la structure de la forêt en dessous de cette couverture végétale.
L’agence spatiale se réjouit de la qualité des clichés, qui laisse présager du meilleur pour la suite de la mission. Et montre au passage que les instruments de Biomass peuvent être un atout dans d’autres domaines que l’étude des forêts. Le radar voit par exemple dans l’épaisseur glaciers, mais aussi à travers le sable, jusqu’à 5 mètres de profondeur. Il peut ainsi révéler la structure géologique du terrain sous le sable des déserts. On pourra y déceler «d’anciens lacs ou lits de rivière», pour «comprendre le climat du passé et chercher des ressources d’eau fossile dans les régions désertiques».