Aucune relève n’est prévue sur la Station spatiale internationale (ISS) avant le mois d’octobre, mais les astronautes à bord devraient tout de même accueillir dans les prochains jours une nouvelle arrivante, nommée Rosie. Equipée d’une combinaison spatiale bleue flambant neuve siglée Boeing, elle aura l’honneur de vivre un décollage depuis Cap Canaveral en Floride, un voyage en apesanteur jusqu’à 400 kilomètres d’altitude et un amarrage à l’ISS. Mais elle n’en gardera malheureusement pas de souvenir, car Rosie est un mannequin.
Indépendance
Le vol inaugural de la capsule spatiale Starliner était initialement programmé vendredi, puis ce mardi à 19h20 (heure de Paris), avant d’être retardé une nouvelle fois pour une histoire de valve mal positionnée dans le système de propulsion. «Les problèmes ont été détectés lors des vérifications après les orages électriques qui sont passés sur le centre Kennedy ce lundi», annonce Boeing dans un communiqué. Pour ne prendre aucun risque, la fusée va être rentrée ce mercredi dans son bâtiment pour de plus amples vérifications. Une nouvelle date de lancement sera annoncée quand le problème aura été compris et résolu.
Starliner n’embarquera pas de vrais passagers humains, au cas où les choses se passent mal. Ce sera juste d’une répétition générale destinée à prouver que ce nouveau vaisseau privé de conception américaine est bien capable de transporter des astronautes en sécurité. L’enjeu est de taille : il s’agit pour les Etats-Unis de reconquérir leur indépendance dans l’accès à l’espace, après neuf ans à dépendre de la Russie et payer 80 millions de dollars (67 millions d’euros) par astronaute pour louer une place dans les capsules Soyouz. Les Américains n’avaient plus de véhicule spatial souverain depuis 2011, date d’arrêt des navettes spatiales.
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La fin de cette dépendance est passée par Boeing et SpaceX, les deux sous-traitants privés de la Nasa sélectionnés pour concevoir un nouveau vaisseau américain. Le planning initial prévoyait une mise en orbite dès 2015, mais il a été bouleversé par de gros retards dans ce cadre inédit de partenariat public-privé. Finalement, le Crew Dragon de SpaceX s’est envolé l’an dernier pour la première fois et emmène régulièrement, depuis, des astronautes vers l’ISS (dont Thomas Pesquet en avril).
Le Starliner de Boeing, de son côté, aurait dû être prêt dans les mêmes délais mais son premier vol d’essai en décembre 2019 n’a pas été une réussite. La fusée Atlas V a correctement décollé, puis la capsule Starliner s’en est séparée pour continuer son voyage seule… Mais son horloge interne a mal fonctionné, et la capsule n’a pas pu se mettre dans une orbite correcte pour atteindre l’ISS. A la place, Starliner s’est contenté de boucler plusieurs tours de la Terre avant de revenir au sol deux jours plus tard.
Vaisseau cargo
Enquête, vérifications, réparations, tests et retests, pandémie de Covid… Et voici Boeing en 2021, prêt à retenter l’expérience. Perchée sur son Atlas V à Cap Canaveral, la capsule Starliner est prête à décoller depuis la semaine dernière. Elle aurait dû partir vendredi mais un bouleversement dans l’emploi du temps des astronautes de l’ISS, dû à l’arrivée un peu problématique d’un module russe, a reporté la date du lancement à ce mardi. «On voulait s’assurer d’avoir un peu de marge pour bien gérer la situation dans la station spatiale avant d’y faire venir un autre véhicule», a expliqué Kathy Lueders, administratrice adjointe de la Nasa.
Après son décollage à 19h20, Starliner rattrapera l’orbite de l’ISS en moins d’une journée et s’y amarrera pour quelques jours. Les sièges resteront inoccupés (à part celui de Rosie) mais pour ne pas partir à vide, la capsule servira de vaisseau cargo : les astronautes y récupéreront 215 kilos de matériel pour la station, vêtements, nourriture… L’espace sera aussi utilisé pour redescendre sur Terre 260 kg de poubelles, matériel usagé et expériences scientifiques terminées.
Quant au mannequin Rosie, il sera bardé de capteurs pour comprendre ce que subira le corps des astronautes lors de leurs vols. «Rosie nous a donné une idée précieuse de la force qui s’exerce sur le siège du commandant durant le premier vol» en 2019, explique Dan Niedermaier, ingénieur à Boeing chargé des questions liées à l’équipage du module. Et cette fois, «les nouveaux capteurs recueilleront des données pour caractériser le mouvement des quatre sièges passagers. Globalement, tous les sièges se comportent de manière similaire. Mais il y a des petites différences que nos ingénieurs veulent valider pour s’assurer que tout le monde profitera d’un agréable voyage.» En configuration complète, Starliner devrait pouvoir transporter jusqu’à sept astronautes.
Mises à jour mardi et mercredi : ajout du report du vol à une date ultérieure.