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Interview

«A la Renaissance, l’enjeu est de montrer que le corps est beau car il est l’œuvre du divin»

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L’anthropologue Gilles Boëtsch est directeur de recherche et ancien président du conseil scientifique du CNRS.
La naissance de Vénus, William Bouguereau.
publié le 7 mai 2012 à 20h06
(mis à jour le 9 mai 2012 à 11h37)

Gilles Boëtsch, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), est anthropologue, spécialisé dans les questions de représentations sociales et physiques. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur le corps, notamment la Peau, Enjeu de société (CNRS, 2009).

L’artiste Anna Utopia Giordano montre des femmes très amincies par rapport aux tableaux initiaux. Va-t-on vers toujours plus de minceur ?

Tout d'abord, ces images sont étranges, dans la mesure où elles sont décontextualisées. Les positions du corps, par exemple, correspondent à une époque donnée, et, aujourd'hui, on ne les ferait pas poser ainsi. Mais après, en général, ce sont les patrons de mode, les directeurs artistiques de magazines comme Elle qui décident des couvertures, donc ce sont eux qui mettent des femmes de plus en plus jeunes et de plus en plus minces en avant. Dans notre société, par rapport au marché de l'emploi et aux normes sociales, il faut paraître toujours le plus jeune et le plus mince possible, parce que la minceur est la preuve du contrôle du corps. Quand on est gros, on est mou, on est amorphe.

Ce n’était pas le cas à la Renaissance ?

Ces peintures s’inscrivent dans un contexte où la société connaît une révolution alimentaire. Tout le Moyen Age avait été marqué par une famine et, du coup, la représentation corporelle metta