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Interview

Fabienne Giuliani : «Sur la question de l’inceste, la France est plutôt libérale»

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Fabienne Giuliani, historienne, retrace l’évolution de ce tabou :
publié le 24 septembre 2012 à 20h56

Docteure de l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, Fabienne Giuliani est spécialiste de l'histoire de l'inceste. Sa thèse «Enquête sur les relations incestueuses dans la France du XIXe siècle» doit paraître.

L’inceste est-il tabou, et réprimé, dans toutes les sociétés ?

Tout d’abord, le regard de l’historien n’est pas celui de l’anthropologue. L’anthropologie définit l’inceste comme un tabou fondateur d’une civilisation, alors que l’historien se doit d’étudier les étapes du temps. Dans notre société contemporaine, on n’utilise quasiment plus le mot «inceste», la pédophilie fait office de synonyme. Or l’inceste est plus complexe que cela. Il revêt deux sens : celui d’une relation sexuelle non consentie et donc à juste titre assimilée au viol ; mais c’est aussi une forme de sexualité consentie, entre adultes, et qui demeure d’actualité dans certaines familles aristocratiques où les arbres généalogiques témoignent de mariages entre cousins.

C’est un privilège aristocratique ?

Dans l’Egypte pharaonique, oui. Les unions entre frères et sœurs étaient encouragées, comme un privilège lié au rang. Mais quasiment tout au long de l’histoire, et même en remontant jusqu’à l’Empire romain et son code justinien, c’est une question morale : on a toujours sévèrement puni l’inceste. C’est-à-dire la relation sexuelle entre parents proches, qu’ils soient ascendants ou descendants. Mais il existe une tolérance pour les relations entre cousins. Dans ce cas, pour pouvoir se marier dans une même famille, il faut demander une dispense de parenté au roi ou au pape. Sous l’Ancien Régime,