C’est un drôle de carnaval. Où ne se croisent que des hommes. Sous les moulures et la lumière tamisée du Carmen, une boîte de nuit parisienne à Pigalle, un militaire américain salue quelques mafiosi à chapeaux. Un trappeur à épaisse chemise à carreaux se mêle aux petites frappes, blouson en cuir et casquettes. Devant un miroir, un élégant monsieur, en costume complet et haut de forme, se réajuste le nœud de pap’.
L’ambiance a beau être virile, le taux de testostérone frise le zéro. Ce soir, dans cette ancienne maison close, se tient un atelier drag-king. Une soirée au cours de laquelle les femmes sont invitées à se transformer en hommes, avec du poil au menton et du monde dans le caleçon.
«Welcome back, les mecs !» lance à la troupe Louis, convaincant petit gars brun à fine moustache. Dans le civil, Louis s'appelle Louise de Ville et est performeuse burlesque. C'est elle qui a eu l'idée d'importer de son pays natal, les Etats-Unis, ces ateliers nés dans la culture lesbienne underground (1). «L'objectif c'est de questionner les codes masculin-féminin. La démarche est féministe : il s'agit de montrer que la notion de masculinité n'est pas naturelle, ni sacrée et qu'il suffit de quelques artifices, au final, pour la construire», explique-t-elle.
Étape. Dans un salon aux lourdes tentures, un vestiaire a été improvisé. C'est ici que la trentaine de participantes va vivre la première étape de la transformation : le «binding». T