Tribunal correctionnel, Paris.
Le procureur pose sur Nestor le regard d'un spécialiste. «Avec les Angolais, ce qui est curieux, c'est qu'ils parlent très bien français alors qu'en Angola on parle le portugais. Moi je crois qu'il s'agit d'un Zaïrois qu'on ne pourra pas renvoyer dans son pays. C'est chaque fois la même chose, à cause du refus de l'ambassade de le reconnaître comme un de ses ressortissants.» Et il conclut «tant pis pour lui, je réclame dix mois ferme». La police a vu Nestor sortir de sa poche deux doses d'héroïne et les donner à Saïd en échange de 100 F. L'histoire est embrouillée, Saïd dit avoir été abordé par un rabatteur qui l'a mené vers Nestor. Nestor jure: «On a fait bourse commune, il en voulait pour 100 F et comme j'avais 200 F, j'ai pris ses 100 F et je suis allé acheter pour nous deux.» L'avocate de Nestor est ironique: «Il faut peut-être ramener la chose à de justes proportions, quand j'entends que l'on réclame dix mois de prison pour 100 F de drogue!» Un quart d'heure plus tard, Nestor est condamné à huit mois ferme et à l'interdiction définitive du territoire français. «Cette fois, monsieur, c'est terminé», assure la présidente, mais dans la salle les connaisseurs s'amusent, «ça ne change rien, il ne repartira pas». Salah a l'air résigné, il est malien et s'est maintenu en France malgré un arrêté de reconduite à la frontière. La présidente joue l'étonnée. «Pourquoi restez-vous en France? Pour le travail, c'est ça?» Salah est en France depuis neuf an