Un air de jeune fille moderne, vêtements de sport et cheveux
relevés. Une voix murmurée, qui trébuche parfois sur les mots. Un passé déjà chargé malgré l'âge (20 ans). Née au Togo, Henriette Siliada a détaillé hier, devant le tribunal correctionnel de Paris, les injonctions et les contraintes qui constituèrent sa vie de domestique asservie. En France. Travail depuis l'aube jusqu'à la nuit, sept jours sur sept. Le tout sans papiers, sans sorties ni salaires. De juillet 1995 à juillet 1998, Henriette fut l'employée de la famille Bardet, Yasmina et Vincent, un couple parisien inséré dans la «bonne société». Le père de Vincent Bardet a fondé les éditions du Seuil après-guerre, sur des principes plus qu'honorables. En sus d'une ligne éditoriale souvent récompensée par des prix prestigieux, la maison s'honore d'un fond «catho de gauche»: de la morale, des engagements, notamment contre la guerre d'Algérie. Bref, des «gens bien».
«Indignation.» Comme son père, Vincent Bardet travaille au Seuil; si occupé qu'il laisse à sa femme Yasmina, d'origine mauritanienne, l'intendance du foyer. Un grand appartement où l'on reçoit souvent, et quatre enfants. Henriette est arrivée comme ça en 1995, par l'intermédiaire d'une amie de Yasmina, pour aider, mais «elle n'a jamais été engagée». Au début, «elle n'avait rien, juste une petite jupe noire et ses cheveux courts», dit Yasmina Bardet, qui comparaissait ainsi que son époux pour «conditions de travail et d'hébergement incompatibles avec la dignit