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Libération

«Etes-vous mariés sous le régime de la polygamie?»

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publié le 25 octobre 1999 à 1h19

Tribunal correctionnel de Bobigny

Dans le box, Nordine et Saïd pleurent. Ils ont été arrêtés pour usage et cession d'héroïne, de cocaïne et de cannabis. «J'avais un travail, j'étais fonctionnaire, ma copine est partie avec notre bébé, j'ai tout perdu», hoquette Nordine. «Vous bousillez votre vie, c'est le cercueil au bout de l'héroïne», sermonne la juge. Le jeune homme secoue la tête: «Vous ne pouvez pas comprendre"» Et la juge le reprend: «Je crois que j'en sais assez pour comprendre.» Mais Nordine insiste. «Non. L'héroïne vous fait tout oublier et on a des amis, des relations. Tout le monde est gentil avec nous, les autres ont besoin de nous.» Nordine servait de rabatteur à Saïd. «Tout est bon pour obtenir une dose, je n'ai pas de revenus. Mon seul moyen était de graviter autour de Saïd et de l'arranger. Ça fait longtemps que je suis toxico.» A côté de lui, Saïd parle d'une voix étouffée par les larmes: «J'ai essayé d'arrêter, mais j'y arrive pas et puis je ne peux rien dire à ma famille.» La magistrate sourit «Mais enfin, vous êtes majeur, vous n'êtes pas obligé de le dire à vos parents pour vous faire soigner.» Le procureur se lève. «Voilà de petits trafiquants, dont les antécédents commencent à devenir lourds, c'est une certaine délinquance, une certaine toxicomanie qui s'installe. Il faut les condamner avec une partie de prison ferme assortie d'une mise à l'épreuve puisque ni l'un ni l'autre n'ont eu le courage d'aller au bout d'une cure.» L'avocate montre ses clients.