Le ciel est bleu azur et le facteur débonnaire achève sa tournée en
prenant un verre au café du coin. Ambiance villageoise. La Grande Borne (Essonne), ce triangle de 4 000 logements coincé entre les autoroutes et la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, s'ébroue avec nonchalance après deux jours d'émeutes. Quelques voitures et poubelles calcinées, cinq cars de CRS prudemment garés le long de la frontière donnent une petite idée des dégâts. «On a raconté que nous étions 180 policiers contre 80 jeunes, maugrée un CRS en faction. J'aurais bien aimé! Malheureusement nous n'étions qu'une vingtaine.» De fait, la force publique a plié lundi soir, sous les coups de boutoir cocktails Molotov et pavés de la jeunesse en surnombre: un brûlé et quatre contusionnés. Le local des îlotiers de la Grande Borne n'a pas mieux résisté: incendié. Mardi soir, par un prompt renfort d'une compagnie de CRS (80 hommes), les incidents se sont limités à quelques feux de poubelle. Toutefois, quatre policiers isolés n'ont dû leur fuite qu'à l'usage de gaz lacrymogènes. Dans le camp d'en face, un coup de feu a été tiré. Si le fait générateur est désormais bien cerné, l'alchimie qui l'a fait dégénérer reste encore incertaine.
Expédition punitive. Dimanche soir, Duran, 23 ans, d'origine turque, a tué Guillain, 20 ans, d'origine zaïroise. Cinq amis, du moins jusqu'à ce jour, s'étaient réunis dans une cave aménagée en salle de jeux. L'un est mort, l'autre est en prison, les trois autres hésitent encore à témoign