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Libération

L'arme fatale du journal intime. Lors d'un divorce, les juges se servent des écrits personnels pour établir la faute et prouver l'infidélité.

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publié le 7 janvier 2000 à 21h56

Un bon conseil: à moins d'en faire oeuvre littéraire (1), ne

consignez jamais par écrit vos infidélités conjugales. En mai dernier, la Cour de cassation a admis sans réserve l'utilisation du journal intime d'une épouse comme preuve de son adultère. C'est à vous dégoûter d'écrire. «A vous dégoûter du mariage», complète le professeur Alain Bénabent, auteur du classique Droit civil, la famille. Publiée dans la dernière livraison de la Semaine juridique, la décision décourage les partisans d'une modernisation du mariage: «On répondra que le mariage confère à chaque conjoint un droit de regard sur la vie privée de l'autre. C'est, pourrait-on dire, la logique de l'institution. Mais qu'il permette de traquer les écrits du conjoint afin de les utiliser, plus tard, contre lui, nous paraît discutable», critique Thierry Garé, professeur à la faculté de droit de Toulouse. Selon Alain Bénabent, «cette décision est le prolongement, adouci, de la loi qui accordait jusqu'au milieu du XXe siècle des excuses à celui qui tuait l'amant de sa femme». Ce n'est pas la première fois que ce genre de viol est légitimé par la justice. Dans le divorce, la faute «peut être établie par tout mode de preuve». Depuis 1975, l'adultère n'est plus constitutif d'une cause «péremptoire» de divorce et n'entraîne plus de sanction pénale. Mais il est resté dans l'esprit de nombreux magistrats l'atteinte suprême à l'institution, et c'est presque toujours en son nom qu'ils admettent les pires entorses au respect de l