Trente mois que Youssef tourne en rond. Après avoir purgé une lourde
peine, le Marocain devait être expulsé à l'été 1997. Mais comme il a attrapé le sida en prison, la France l'a assigné à résidence à Paris, sans lui laisser le droit de travailler. Et, depuis, Youssef moisit dans une chambre au bord du périphérique, tenu à bout de bras par des associations, dans une totale impasse administrative. On lui donne 300 F par semaine pour manger et il a perdu la moitié de ses dents. Simple détenu avec double peine et trithérapie, il a entamé il y a une semaine une grève de la faim. Le cas est exceptionnel, et la préfecture a décidé de lui fournir ce matin une autorisation de travail. Récit.
Double peine. Youssef est arrivé de Casablanca en 1968 avec son frère. Il avait 13 ans. Puis le frère a fait des études de médecine à Limoges. Youssef, lui, s'est trouvé un lot de vrai-faux papiers et s'est installé dans le trafic de stups dans le Nord: «C'était mon métier.» Il s'est fait pincer en 1984, puis il est condamné en 1986 dans une affaire de viol qu'il conteste. Dix ans de réclusion criminelle. Lorsqu'un Français sort de prison, il a payé sa dette. Un étranger en a une deuxième: l'expulsion. C'est la double peine. Youssef revoit la lumière du jour le 28 février 1997 et tombe au greffe sur deux policiers qui l'embarquent aussitôt au tribunal. Il est condamné pour refus de reconduite à la frontière. Dix mois de prison et dix ans d'interdiction du territoire: retour au trou. Il est vrai