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Analyse

Les mots que le pape n'a pas dits.

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Protégeant son Eglise, Jean Paul II a déçu les attentes des Israéliens.
publié le 24 mars 2000 à 23h19

Jean Paul II aura, hier à Yad Vashem, fait de son mieux pour satisfaire ses hôtes israéliens. Comme il aura accompli beaucoup, depuis vingt-deux ans, et même auparavant, en faveur de ses «frères aînés» juifs. Il aura fait le maximum. Mais il n'a pas su, pas pu dire les mots que l'on attendait de lui à Jérusalem. Et, surtout, pas voulu.

«Silence» ­ le mot a été répété à l'entame de son discours, comme si le Saint-Père eût préféré laisser à la méditation intime l'horreur du génocide. Mais il fallait parler, là, dans ce lieu entre tous signifiant. Il l'a fait. A sa manière.

Silence. Silence dans la tourmente de 1939-1945, que bien des juifs reprochent à l'Eglise. Silence de Pie XII devant les persécutions nazies. Or il est des moments où il faut forcer les prudences, les pudeurs ou les lâchetés" L'Eglise ne l'a pas pu, ne l'a pas voulu.

Entre ces deux douleurs, il y a un homme. Témoin et acteur à la fois. Karol Wojtyla, jeune curé polonais, qui secourut Edith Tzirer, en janvier 1945. Celle-ci, parmi d'autres rescapés de la mort brune, était là hier pour l'accueillir.

Jean Paul II représente, à lui seul, une double première dans l'histoire de l'Eglise. Il a fait ce que son prédécesseur, Paul VI, s'est refusé de faire en 1964 lors de sa visite en Terre sainte: se rendre à Yad Vashem. Mais, surtout, il est le premier pape à avoir affronté la dimension collective, et aussi subjective, de la Shoah. La douleur juive, il sait ce que c'est, au-delà de la théologie ou de l'