Bonfol est un village suisse absolument charmant, entouré de collines, de prés et de forêts. Les vaches meuglent gentiment au passage des voitures, et l'odeur des fleurs de printemps imprègne l'air du soir. Bonfol est aussi le site de l'une des trois plus grosses décharges industrielles de la Confédération helvétique, où pendant quinze ans, différentes entreprises chimiques de Bâle (Novartis, Ciba, Hoffman-La Roche, Henkel, etc.) ont déversé 114 000 tonnes de «déchets spéciaux», en fûts ou en vrac: colorants, résidus agrochimiques, insecticides, produits pharmaceutiques, métaux lourds, poudres, boues, etc. L'armée helvétique y a apporté sa contribution en y jetant de vieilles piles, et l'industrie horlogère s'est débarrassée de solvants. En 1976, la décharge est fermée, recouverte d'argile, et plantée de verdure et d'épicéas.
Aujourd'hui, les autorités suisses ont donné cinq ans à la chimie bâloise, exploitant officiel de la décharge, pour assainir définitivement le site. Car la décharge fuit. Pour l'heure, aucune pollution n'a été relevée dans les eaux captées. Mais le risque existe. Et si contamination il devait y avoir, elle concernerait d'abord la France: Bonfol est à 200 mètres de la frontière et les eaux s'écoulent vers le nord. La décharge étant construite pile sur la ligne de partage des eaux, il y en aurait, virtuellement, pour tout le monde: l'Alsace côté Rhin, la Franche-Comté côté Rhône. Les Verts, qui ignoraient tout de l'existence de la décharge il y a six mois,