Menu
Libération

Carnets de justice. «C'est elle qui me donne des claques, je suis tout griffé!»

Article réservé aux abonnés
publié le 15 mai 2000 à 1h17

Tribunal correctionnel de Paris.

Gilles promène sur la salle son regard égaré. Depuis quelques semaines, il est en détention provisoire pour vol, et «demande sa mise en liberté», lit le président. Il était passé en comparution immédiate et les juges avaient ordonné une expertise psychiatrique. «Vous avez vu le psychiatre en prison?» s'enquiert le président. Il n'a vu «personne». Son avocate commence d'une voix timide: «Je signale au tribunal qu'il s'agit de circonstances assez particulières, puisqu'on a ordonné la détention provisoire par crainte qu'il ne se présente pas à l'expert psychiatre.» Le président a un sourire ennuyé. «Il nous faut cette expertise et elle est beaucoup trop compliquée à organiser dehors. Votre client vit en foyer, comment le joindre?» Le ton de l'avocate se fait plus dur: «La détention provisoire doit être exceptionnelle. Il s'agit d'un vol d'appareil ménager, restitué au magasin, il n'y a donc pas de victime! Et pour des contingences matérielles, on va le mettre en prison? Est-ce là une bonne administration de la justice?» Elle frappe son dossier. «Qu'il soit jugé dans un mois ou dans six, pensez-vous que ce soit si grave?» Gilles est libéré. On enlève les menottes d'Alexandre, un beau jeune homme souriant aux cheveux bouclés. Au fond de la salle, une fille lâche la main de sa mère et s'avance. Elle est défigurée par un gros cocard. Le président fixe Alexandre: «Vous avez déjà fait l'objet d'hospitalisation? Non? Parce que votre comportement est