«Vous pensez arrêter quand?», interroge le Dr L., attachée à la
consultation de sevrage tabagique du service pneumologie du Professeur Lebeau, à l'hôpital Saint-Antoine à Paris. «Je ne sais pas», répond la patiente. Au mois de novembre, cette femme âgée d'une cinquantaine d'années a été opérée d'un cancer de la langue. D'une voix douce, le médecin retrace avec elle l'historique de sa dépendance. «Vous avez commencé à fumer vers l'âge de 20 ans?», «Vous avez décrit le plaisir de la cigarette comme très intense, ce plaisir concerne-t-il toutes les cigarettes que vous fumez?», «Ce qui vous a fait refumer après votre opération, c'est l'odeur du tabac, c'est d'elle dont vous avez besoin?». Objectif: établir le profil de cette fumeuse. Déterminer si son accoutumance est essentiellement chimique ou surtout psychocomportementale. A priori, sa pharmacodépendance à la nicotine est faible, comme sa consommation (une dizaine de cigarettes par jour). Elle affirme d'ailleurs pouvoir se passer de tabac lorsqu'il lui est impossible de fumer. Et pourtant, elle ne parvient pas à rompre avec la cigarette. «Il y a une différence fondamentale entre les profits quotidiens que donne la cigarette et les maladies, qu'elles soient à venir ou qu'elles viennent d'être vécues, explique le Dr L. La maladie peut servir de déclic mais on ne construit pas sur la peur, et remettre en bouleversement son quotidien par l'arrêt de la cigarette demande une énergie autre que la simple peur.»
D'où la nécessité d'un