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Depuis 71 jours, vingt sans-papiers grévistes de la faim se regardent maigrir. Ils ne consomment que de l'eau et du thé sucrés. Les joues creusées, les yeux démesurés, Nader Mustapha fait partie des plus faibles. Il montre ses os saillants comme des trophées et affirme avoir perdu 30 kg. Chaque fois qu'on a réussi à lui placer une perfusion, il l'a arrachée. "J'ai peur de la mort. Mais je veux mes papiers. Tout ce que je demande, c'est la santé et des papiers." Nader Mustapha est algérien, il est arrivé en France en 1997, pour travailler. "J'ai 35 ans. Si je n'ai pas de papiers, je n'ai pas d'avenir. J'en ai besoin vite. Après 40 ans, ça sera dur de trouver du travail."
"Non-assistance". Les grévistes refusent presque tous de se laisser examiner. Certains acceptent de temps en temps. "Sans examen clinique, sans bilan biologique, on ne peut que faire des suppositions, rappelle Estelle Lebas, porte-parole du centre hospitalier régional. A un moment donné, on a craint un ulcère perforé chez une patiente, parce qu'elle avait des troubles visibles. L'alerte est passée, mais cette obstination fait peur. C'est une situation difficile pour nous. Notre métier, c'est de soigner." Hubert Cardon, directeur des services de soins infirmiers, est formel: "Si la situation se dégrade, on interviendra. Notre mission, c'est de soigner." Le consentement du malade? "La législation ne nous permet pas d'intervenir tant qu'ils sont conscients. Mais si on n'intervient pas alors qu