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Libération
Éditorial

Un mythe fracassé

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publié le 26 juillet 2000 à 2h33

Le Concorde est un OVTI ­ un objet volant très identitaire. Non seulement il incarne une certaine idée de la France qui gagne (les Français oublient volontiers qu'il est à moitié britannique), mais surtout il symbolise la modernité triomphante dans toute l'élégance épurée de ses galbes. Cet exploit technique a aussi été une réussite esthétique, nouant d'un seul trait forme et fonction comme les dessinateurs y sont rarement parvenus. Par là, cette machine bien réelle touche à l'utopie, résumant tout un optimisme technologique non encore mouché par la crise (Concorde, fort dispendieux en kérosène a pris son envol juste avant le premier choc pétrolier). Il y a quelque chose en lui d'un beau geste gratuit. C'est peut-être ce panache inutile qui lui a permis d'être rangé, sitôt né, parmi les meubles de famille, même si son usage, ultra élitiste, est resté hors de portée du commun des mortels.

Commercialement, en effet, Concorde s'est écrasé en bout de piste voici un quart de siècle à peu près, dès son envol. Les industriels américains, qui auraient eu les moyens techniques de construire un concurrent, avaient trop de bon sens financier pour ne pas s'en abstenir (en revanche, ils ne se sont pas abstenus de croche-pieds). Comme moyen de transport, en effet, Concorde s'est vite révélé un contresens. Ses inventeurs avaient tout prévu... sauf l'avènement de l'aviation de masse. Dès la conception du Concorde, l'avenir appartenait aux vols bon marché, avec des appareils de grande capacit