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Libération

Une «intime conviction» mène à trente ans de réclusionŠ

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Abdelouab N'Siss reconnu coupable des crimes de viol, actes de barbarie et meurtre. Sans aucune preuve.
publié le 11 septembre 2000 à 4h11

Saint-Omer envoyée spéciale

Dans cette affaire, comme dit un gendarme à la barre, «tout est possible». Même de condamner à trente ans de réclusion criminelle un accusé dont la culpabilité n'est pas démontrée (Libération du 8 septembre 2000). Après trois jours de procès et cinq heures de délibérés, les jurés de la cour d'assises de Saint-Omer (Pas-de-Calais) ont conclu, dans la nuit de vendredi à samedi, qu'Abdelouab N'Siss est coupable des crimes de viol, actes de barbarie et meurtre. Selon la justice, ce Marocain de 22 ans, drogué et un peu simplet, a abusé de Ghislaine Duval, 63 ans, puis l'a égorgée en forêt d'Hardelot, dans l'après-midi du 22 août 1996.

Roi et footballeur. L'accusation repose sur une seule chose: des aveux. Différents, contradictoires et parfois abjects, où N'Siss changeait de version au gré des interrogatoires. N'a-t-il pas aussi affirmé, avant ce mois d'août 1996, lors d'un de ses multiples séjours en hôpital psychiatrique, être le roi du Maroc Hassan II ou encore un footballeur de renommée internationale? Des aveux donc, puis des dénégations farouches.

Aujourd'hui, N'Siss dit avoir parlé à cause de la drogue et de la peur. Mais aucune preuve n'est apportée. Vendredi, une biologiste a témoigné. Elle est formelle: aucune trace de sang sur les habits de N'Siss, pas de sperme retrouvé près du corps de la victime; quant à ce mystérieux cheveu noir prélevé sur le cadavre, il n'appartient pas à l'accusé.

Peu importe. Il y a le visage de N'Siss, un peu patibulair