«Un, deux, un, deux!» Le pied gauche sur le un, le droit sur le deux. Et en avant, marche! Huit heures du matin, je suis au milieu du peloton pour l'exercice «d'ordre serré», bref, l'entraînement au défilé. En colonnes et rangées parfaitement alignées. Les plus grands derrière. Le convoi s'ébranle en martelant du talon gauche le sol gelé et en chantant d'une voix monocorde. Nous n'avons pas le droit à la parka, juste à la veste de treillis. J'ai froid. J'en ai marre. Les militaires paradent le 11 Novembre, le 8 Mai et le 14 Juillet, point final. Nous sommes en février: ces défilés sont passés ou à venir dans bien longtemps. Il y a aussi les grandes couleurs, des prises d'armes en grande pompe devant le chef de corps, mais elles tombent une fois tous les trente-six du mois. Alors à quoi bon? Le savent-ils seulement, ceux qui nous font tourner en rond? Peut-être ont-ils senti qu'il fallait serrer la vis. J'aurais dû m'en douter: la dernière répétition remontait avant l'hiver. Dans les rangs, «ça roule», comprenez que rien ne va. On a perdu la cadence. «Attention pour s'arrêter! Halte!» L'escadron cafouille. Le sous-off' va nous passer un savon. «Si vous ne savez pas marcher, eh bien, on va en faire des tours! C'est vous qui voyez...» Des menaces, toujours des menaces, on ne change pas les vieilles recettes. J'aimerais lui rappeler que nous marchons au pas pour nous rendre à l'ordinaire. Midi et soir. L'adjudant-chef en ajoute une louche: «J'ai tout mon temps, moi...»
En caserne