Depuis quelques mois, les industriels du tabac avaient le moral en berne. Hier, ils ont pu arborer un large sourire. Ils venaient d'apprendre que la Cour européenne de justice (CEJ) annulait une directive sur l'interdiction générale de la publicité pour le tabac en Europe, estimant qu'elle avait été introduite par le législateur européen sur une base juridique erronée.
Juridisme. «C'est un très sale coup pour la santé publique», a réagi aussitôt le professeur Albert Hirsch, chef de service de pneumologie à l'hôpital Saint-Louis à Paris, et pionnier de la lutte antitabagisme en France. «Car, dès demain, les industriels du tabac pourront reprendre leur publicité en Allemagne et en Angleterre. Et même en France. Si le gouvernement français ne fait rien alors que nous présidons actuellement l'Union européenne, c'est la fin de la loi Evin.»
De fait, la décision de la Cour européenne de justice est avant tout juridique. Elle s'appuie sur une aberration dans l'argumentaire de la directive. Adoptée en 1998 par le Conseil des ministres de l'Union européenne et le Parlement européen, cette directive prévoyait d'ici à 2006 l'interdiction totale de la publicité pour le tabac et du parrainage d'événements par les fabricants de cigarettes. Mais cette loi avait été présentée par les institutions européennes comme devant faciliter la réalisation du marché intérieur de l'UE en harmonisant les régimes nationaux, dont les différences d'un pays à l'autre constituaient, selon elles, des entraves a