Caen envoyée spéciale
Dix-huit ans. C'est la peine infligée, vendredi à l'issue de quatre heures trente de délibéré, à l'encontre du curé René Bissey, 56 ans. Dans son box, l'homme ne bronche pas, indéchiffrable et éteint; la cour d'assises de Caen le reconnaît coupable de viols sur un mineur, d'atteintes sexuelles sur trois mineurs et de corruptions de sept mineurs. Onze garçons mais surtout un: la victime principale Ludovic R., 26 ans, qui cache son visage à l'énoncé du verdict. Quelques instants plus tard, entouré de ses proches en sanglots, le jeune homme a un malaise et l'huissier devra appeler un médecin. Après une semaine de lourds débats, après de nombreuses auditions à huis clos et des témoignages publics atterrants pour l'Eglise catholique (Libération du 5 octobre), les jurés ont été bien au-delà de la mesure toute normande à laquelle les enjoignait l'avocat général.
René Bissey risquait vingt ans de réclusion criminelle. Eric Enquebecq, l'avocat général, avait requis douze ans. «Mais n'allez pas trop au-delà, a-t-il dit en substance aux jurés, sinon, l'accusé fera appel et les victimes devront à nouveau subir ça.» Ce «tarif» modéré, justifié par le fait que René Bissey «a tout avoué», qu'il a atteint «le comble de la déchéance», n'a pas emporté l'adhésion de la cour. Elle a, semble-t-il, surtout retenu les premiers mots du ministère public. Cette «lignée d'enfants choisis, dominés puis abandonnés après avoir été souillés». Ces mineurs fragiles, qui ont vécu «des mom