Toulouse de notre correspondant
La dernière fois, c'est un gendarme et un étudiant qui sont devenus exploitants agricoles. Ils avaient tiré le bon numéro. A Nasbinals, village de 509 habitants du plateau de l'Aubrac à 1200 mètres d'altitude, c'est par «tirage au chapeau» annuel que sont attribués depuis des lunes 1 300 des 6 000 hectares de terres agricoles. Au mépris de toutes les lois. «Nous sommes effectivement dans l'illégalité», s'amusait encore le maire, Pierre Aldebert, il y a deux ans (Libération du 23 novembre 1998).
Il rit franchement moins maintenant «je suis même triste», nous confiait-il hier. Le tribunal administratif de Montpellier vient en effet de remettre un peu d'ordre dans ses affaires municipales. Ces 1300 hectares, appelés biens sectionaux, sont les terres que nobles ou ecclésiastiques sans héritiers léguaient en propriété indivise aux habitants de leur fief il y a trois siècles, sous l'ancien régime. «C'est la coutume», explique le médecin ORL Pierre Aldebert: les Nasbinalais profitent toujours de ces lots sectionaux. L'épicier du village, le curé, un ouvrier sont aujourd'hui les bénéficiaires de cette drôle de loterie. En contradiction avec tous les textes qui désignent les agriculteurs du lieu comme prioritaires sur les biens sectionaux à usage agricole ou pastoral. Trois siècles, ça crée des habitudes. Mais l'éleveur Jean Brioude en a eu assez un jour de 1997 de devoir louer son lopin du Coustat à mademoiselle la perceptrice de Nasbinals sans obteni