On ne sait pas si Elisabeth Guigou a prévenu la nouvelle garde des Sceaux, Marylise Lebranchu, mais ça chauffe chez les avocats. Depuis une semaine, dans tous les barreaux de France, ce ne sont qu'assemblées générales, grèves et motions autour de l'aide juridictionnelle (AJ), la justice des pauvres et ses pauvres moyens. Si le budget de la justice a «spectaculairement augmenté, grondent les avocats de Créteil, celui de l'aide juridictionnelle reste tristement stable».
Et la faiblesse des sommes touchées par les défenseurs dans ce cadre «est une nouvelle traduction du mépris de la chancellerie pour l'aide juridictionnelle. Les plus démunis ont droit à une justice au rabais», poursuivent ceux de Dijon. Exemple, une audience au tribunal correctionnel est tarifée quatre «UV», soit environ 560 francs (les UV s'apparentent aux actes «K» des médecins). Pour ce prix, il faut étudier le dossier, le rédiger, le faire taper, recevoir les clients, parfois aller les voir à la maison d'arrêt. «Ces indemnités ne couvrent même pas les seuls frais de fonctionnement des cabinets et mettent en péril l'exercice des avocats qui assurent la défense des moins fortunés», s'emportent les avocats de Nantes.
A l'abattage. Comment s'étonner alors que, parfois, la défense de ceux qui ne peuvent se payer un avocat apparaisse bien défaillante: «Certains d'entre nous s'épuisent à assurer une justice d'abattage et deviennent amers et cette lassitude survient même chez des gens très investis et très courageux»