Sous les yeux des quatre chérubins sculptés sur un des murs de la Cour de cassation, la question de l'avocat des parents de Nicolas Perruche ouvre un grand silence existentiel. Hors d'un tribunal, cela pourrait même ressembler à un non-sens. «La vie est-elle une chance? Et qui aurait l'impudence de demander à Nicolas si sa vie est une chance ou pas?» Me Charles Choucroy ne formule pourtant pas une ineptie, mais, vendredi, les débats autour du cas de ce jeune handicapé ont emmené l'auditoire bien au-delà du droit.
Chance de vivre? Comment Nicolas Perruche, «débile profond, sourd, pratiquement muet», selon Me Choucroy, doté d'un quotient intellectuel entre 30 et 50, pourrait en effet savoir si sa vie est une chance? Cette question fonde pourtant la démarche de son père, venu demander à l'assemblée plénière de la plus haute juridiction d'indemniser son fils les parents ayant déjà obtenu réparation pour être né handicapé. Nicolas Perruche, victime peu après sa naissance, en janvier 1983, de troubles neurologiques dus à une rubéole transmise par sa soeur à sa mère. La maladie, développée durant la grossesse, a été mal repérée par le médecin du couple et le laboratoire chargé des expertises. Dès 1992, le tribunal de grande instance d'Evry a condamné le médecin et le laboratoire pour avoir commis des fautes, à l'origine des handicaps de l'enfant. Le médecin fait appel et déclenche un long débat juridique que la Cour de cassation examinait vendredi. Le débat a pour point d'ancrag