C'était un beau bébé, ce Lubin. A la peau douce qui sentait bon, ils disent aujourd'hui. Ses parents qui l'ont tué. Qui en ont fait un bébé mort, au corps tout mou, fracturé, déchiré, plein d'hémorragies à l'intérieur. Lubin avait huit semaines le jour de son décès, en décembre 1994. Depuis, ses parents n'ont cessé de se rejeter la responsabilité du crime. Ils continuent ces jours-ci devant la cour d'assises de Nanterre (Hauts-de-Seine), où, pétrifiés dans la haine et le mensonge, ils risquent chacun trente ans de prison.
Elle s'appelle Magali, lui, c'est Jérôme. Une blonde un peu sèche, un brun rigide. Mais ils présentent bien : elle est ingénieure au Commissariat à l'énergie atomique, il est violoniste. Des existences studieuses, un peu solitaires, nourries au sein de familles aisées et raisonnablement catholiques. Jérôme, médaille d'or du Conservatoire de Versailles, «ne ressent l'émotion qu'à travers les notes». Il parle d'une voix monocorde, le visage est banal, avec lunettes et raie sur le côté. En 1993, il a 25 ans et un gros chagrin d'amour. «Je voulais fonder une famille, je ne supportais pas d'être seul.»
«Amour» en roumain. Par le biais d'une agence matrimoniale, il rencontre Magali, 26 ans. Qui était «obsédée par le célibat ; autour de moi, tout le monde avait des enfants.» Orgueilleuse et complexée, cette ex-élève de l'Ecole centrale ne connaît pas grand-chose aux hommes. A l'agence matrimoniale, elle donne sa recette du couple idéal. «Une intellectuelle plus un a