«A la lecture du jugement, j'ai fondu en larmes. C'était un trop-plein après tant d'années de bagarre avec des gens qui voulaient nous faire passer pour des fous procéduriers, témoigne Jacques Esnault. C'est un énorme soulagement de voir notre bon droit enfin reconnu, de s'entendre dire qu'on a été victimes d'une injustice.» Cet ex-restaurateur est englué dans une saga judiciaire de près de quinze ans son hôtel restaurant avait été déclaré en état de «ruine», alors qu'il nécessitait seulement d'importants travaux , ce qui l'a conduit à la faillite (Libération du 24 octobre 2000). Hier matin, le tribunal de grande instance de Rennes a condamné l'Etat pour «un fonctionnement défectueux du service public de la justice qui procède d'une faute lourde» et a accordé 1,2 million de francs de dommages et intérêts aux époux Esnault, qui réclamaient 5,455 millions.
Aveux. L'Etat reconnaît ainsi que les déboires professionnels du couple sont imputables à un arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes en novembre 1986. Fait rarissime dans les annales judiciaires, le juge Alain Le Caignec, auteur de cet arrêt, s'est accusé d'avoir rendu une décision «bâclée». Ce sont d'ailleurs ces aveux écrits en 1995 qui fondent la dernière décision du TGI de Rennes, et qui ont permis de contourner le sacro-saint principe de l'autorité de la chose jugée.
Dans ses courriers successifs, le président Le Caignec décrit l'indigence d'une justice d'abattage: au moment où il a signé cet arrêt controversé, la 4e