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Libération

«On a lu Kant sur fond de pelleteuses».

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La délocalisation de Normale sup de Paris à Lyon fait grincer les dents.
publié le 11 décembre 2000 à 7h47

L'Ecole normale supérieure voyage mal, même sur de courtes distances. La délocalisation à Lyon de la prestigieuse école de Fontenay-Saint-Cloud, la soeur cadette de la rue d'Ulm, n'est pas encore digérée par tous. «L'an dernier, personne n'osait y croire. De temps à autre, on nous montrait des plans, mais on ne les regardait même pas. Pour nous, Normale c'était Paris», raconte Marick, 21 ans, étudiante en deuxième année. Aujourd'hui, deux mois après sa rentrée lyonnaise, elle n'assistera pas à la cérémonie officielle d'inauguration par Jack Lang et Raymond Barre: Marick doit se rendre à Paris pour son cours de violoncelle.

Côté professeurs, ce fut la désertion. A l'annonce du grand déménagement, près de 80 % d'entre eux ont refusé de suivre. Beaucoup ont choisi un départ en retraite ou en préretraite. Le directeur de l'école, Sylvain Auroux, prend les choses avec optimisme: décidée en 1997, cette délocalisation est un «défi» qui va permettre un rajeunissement de l'institution.

En attendant, certains élèves allergiques à la province n'hésitent pas à demander une année de congé (l'école en autorise deux pendant le cursus de quatre ans) pour débusquer un autre cadre d'études à Paris. Sciences-Po et les écoles de commerce sont les premiers lieux de reconversion. «L'une de mes amies a découvert HEC; elle hésite à revenir», raconte Marick. Et pourtant, instruits par la délocalisation controversée de l'ENA à Strasbourg en 1991, les pouvoirs publics n'avaient pas lésiné sur les moyens