Alençon envoyé spécial
Cette grosse vache grise n'est, semble-t-il, pas folle du tout. Elle s'agite violemment, meugle, et rue désespérément dans le couloir qui va l'amener tout droit au «tueur». Il est midi à l'abattoir de l'entreprise Selvi, à Alençon (Orne). Jean Daniel, vétérinaire, contrôle les papiers d'origine de l'animal et coche la case ad hoc: la bête a plus de 30 mois, elle est bonne pour le test de dépistage obligatoire de l'ESB. Etiquette jaune bien visible. Un signe de tête du praticien, et le commis lance son cri de guerre: «Jacques, tu peux tuer!» La herse métallique bascule, la vache est poussée en avant: elle reçoit un coup de «matador» en plein front. La voilà morte: 450 kilos de carcasse saignante, pendue au plafond par des crochets. Dans cette installation de taille moyenne qui a traité 536 bêtes depuis le 2 janvier, rien n'est laissé au hasard.
Code-barres. Les bouchers s'affairent à la scie électrique, dépiautent, retirent les parties «à risques» (moelle épinière, thymus, etc.). La tête est proprement coupée, accrochée avec d'autres. Direction une petite salle attenante. Revêtu d'une combinaison verte flottante, d'une cagoule et d'un masque antigiclures, un employé de Selvi, dûment formé par les vétérinaires, effectue le prélèvement (un toutes les trois minutes en rythme de croisière) de quelques centimètres cubes de cervelle avec une cuillère jetable spéciale en plastique vert. Sous le contrôle d'un deuxième praticien, il enferme le prélèvement dans une