Angers envoyée spéciale
Pendant vingt ans, Jean-Pierre Weis a vécu. Une épouse, un garçon, un bon boulot en région parisienne. Il a aussi rêvé. Que sa soeur Jacqueline était quelque part, heureuse, avec un mari et des enfants. «Des fois, je la voyais dans la rue, dans le métro. Une silhouette blonde, bouclée, avec des lunettes, c'était forcément Jacqueline. Je lui courais après, mais je n'arrivais jamais à la rattraper.» En 1997, «le cocon se brise». Après des années de batailles, l'Association de défense des handicapés de l'Yonne (Adhy) obtient l'ouverture d'une instruction à Auxerre. Sept jeunes filles déficientes mentales, sans famille, ont disparu entre 1977 et 1979. Parmi elles, Jacqueline. L'enquête démarre, on s'inquiète enfin. «Jusque-là, j'espérais toujours. Il fallait que j'y croie pour aller bien. Mais d'un coup, mon monde s'est écroulé. Je ne comprenais plus. Je me suis sauvé comme un gosse qui a piqué des bonbons.»
En transit. Direction Angers, où il loge dans une HLM des faubourgs, pièces vides et ampoules nues, peu de meubles et encore moins de souvenirs, du lino par terre et vue sur un bout de gazon. «Ça a été toute ma vie comme ça, en transit.» Jean-Pierre Weis voit souvent son fils (14 ans aujourd'hui) et son ex-épouse, installés dans le coin. A part ça, il ne fait rien. «Je ne peux plus tenir un emploi. Je dors très peu, je mange n'importe quoi, je pleure dans mon lit, je pense à ma soeur.»
Jacqueline a disparu le 4 avril 1977. Ce jour-là, elle doit prendre u