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Libération

Les juges se passent du prévenu et de son avocat.

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La remise en liberté d'un sourd-muet refusée en dépit des droits de la défense.
publié le 17 janvier 2001 à 21h54

Comment se défendre devant ses juges quand on est sourd-muet ? La chambre d'accusation de Paris, statuant sur une demande de remise en liberté, a trouvé l'astuce. Juger en l'absence du prévenu et, pourquoi pas, de son avocat. L'avocat en question brandit aujourd'hui la menace d'un recours auprès de la Cour européenne des droits de l'homme.

En avril dernier, la police opérait un coup de filet dans le milieu des sourds-muets ukrainiens, ces ombres furtives qui glissent un porte-clés sur les banquettes du métro ou sur les tables des restaurants, dans l'espoir d'une pièce ou d'un billet. Les enquêteurs avaient démantelé une organisation pyramidale très structurée, opérant sur plusieurs pays d'Europe et composée exclusivement, de la fourmi de base au grand chef international, de sourds-muets d'Ukraine et de Moldavie. Le chef : Anatoliy Y., 40 ans, sourd-muet, donc. Il est incarcéré à la Santé avec sept de ses coaccusés et mis en examen pour «travail dissimulé, emploi d'étrangers sans titre de travail, aides aux séjours irréguliers commis en bande organisée». Il risque jusqu'à dix ans de prison.

Refus. En juillet dernier, Anatoliy Y. a prévenu par courrier son juge d'instruction qu'il souhaitait changer d'avocat. Défendu jusque-là par un avocat commis d'office, il opte pour Thomas Bidnic qui vient le voir à la Santé. «La communication n'était pas facile, mon client étant sourd-muet intégral et ne connaissant pas du tout le français». Le 3 août, sur les conseils d'un codétenu, Anatol