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Libération

Dix ans de perdus sur la leucémie

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Les tests alarmants de Michel Leclerc lui ont été cachés.
publié le 19 janvier 2001 à 22h00

«Il a fallu que je vole mon dossier médical chez mon généraliste!» C'était en 1994. Ce jour-là, Michel Leclerc découvre l'origine de sa leucémie. Il a été contaminé dix ans plus tôt en respirant de la poussière radioactive, alors qu'il était mécano intérimaire à la Comurhex, une entreprise de purification de l'uranium de Narbonne. Pis, le médecin du travail de cette filiale de la Cogema lui a caché des analyses de sang qui auraient permis de diagnostiquer plus tôt sa maladie, voire de la prévenir. «En 1983, je me suis senti plié de fatigue. J'avais 32 ans et je ne pouvais plus avancer. Je vais à l'hôpital de Narbonne, j'avais un taux de globules blancs élevé. Ils me disent que c'est un excès de tabac.»

Asthénie. Son histoire ressemble à celle de nombre d'intérimaires du nucléaire: «On n'avait pas suffisamment de formation et d'information sur la dangerosité des produits.» Malgré l'asthénie, Michel retourne bosser. Intérimaire puis employé à la Serci, une société sous-traitante, il ne quitte pas l'enceinte de la Comurhex de 1980 à 1984. «Dans l'urgence, ce sont toujours les sous-traitants qui interviennent dans les secteurs à risque. Quand le four est chargé, c'est irrespirable. Il faut faire des soudures dans des cuves mal nettoyées, démonter des tuyaux soi-disant propres où il reste de l'uranium soluble.»

Les particules qu'il inhale se fixent sur ses os. Son analyse de sang du 11 avril 1983 révèle un taux d'uranium de 330 microgrammes par litre, trois fois plus que la norme m