En mars 2000, quand Lionel Jospin lui a donné le ministère «délégué» à la Famille, il devait se douter qu'elle ne resterait pas très longtemps «déléguée». Ce matin, Ségolène Royal convie la presse à une conférence modestement intitulée «La réforme de l'autorité parentale». Il s'agit en réalité d'officialiser une OPA qu'elle mène patiemment depuis sa nomination: c'est elle, désormais, qui entend piloter la réforme du droit de la famille, un chantier relevant traditionnellement du ministère de la Justice. Avec l'approbation tacite de Matignon: s'il n'y a pas eu de réel «arbitrage» en faveur de la ministre déléguée, il n'y a pas eu non plus d'opposition. Pas d'alternative serait plus exact. On lui avait donné mission d'«adapter le droit aux réalités», et elle compte dessiner aujourd'hui un projet de société. Ségolène Royal prend des risques: ce gouvernement n'a jamais exprimé clairement ce que recouvrait la «famille», notion écartelée entre les courants contradictoires qui traversent la gauche.
Au printemps dernier, elle rêvait du ministère de l'Education et s'est retrouvée très à l'étroit sous la tutelle de Martine Aubry. A l'époque, Elisabeth Guigou campait fermement sur les prérogatives de son ministère de la Justice: le droit de la famille et le code civil se traitent à la chancellerie. En mai, lors d'un colloque du ministère de la Justice, «Quel droit pour quelles familles?», où il ne fut question que d'«ordre symbolique», de «normes», de «repères», Ségolène Royal avait vol