Les familles désunies le sont chacune à leur façon. Les plus pauvres se retrouvent exclues des valeurs nouvelles de «coparentalité»: comment exercer son droit d'hébergement avec un Smic, quand le fisc, les bailleurs sociaux, la SNCF vous traitent comme un célibataire? Comment, dans ces conditions, envisager une garde alternée? Les couples capables de s'entendre voient leurs accords privés niés par la justice ou l'administration qui les contraint à dire quel est le parent «principal» et quel est le «subalterne» qui n'existera pas à ses yeux. Le constat est posé depuis des années, mais la réforme du droit de la famille, annoncée pour 1999 par Elisabeth Guigou, alors garde des Sceaux, semblait enlisée.
Hier, Ségolène Royal a repris publiquement les rênes du chantier. La ministre déléguée à la Famille articule sa réforme sur deux piliers: la refondation de l'autorité parentale, et l'égalité entre père et mère après séparation. Le renforcement de la paternité est une priorité, «ce qui ne signifie pas que l'on va contre les femmes». «Un adolescent sur quatre vit avec un seul parent, et la plupart n'ont plus de contact éducatif avec le père. Une pension alimentaire sur cinq est impayée et le sentiment de marginalisation n'y est pas étranger», a rappelé la ministre. Elle parle depuis longtemps de la douce marginalisation des pères «ludiques», qui ne voient leurs enfants que le dimanche pour les amener au cinéma et n'osent plus exercer cette autorité parentale. Ce n'est pas un détail: