Lucien Léger, 64 ans, vit en prison depuis le 6 juillet 1964. Depuis trente-sept ans. C'est le record de France et, vraisemblablement, celui d'Europe. De son premier jour en prison, il disait récemment: «A cette époque, lorsqu'on entrait dans une cellule, il n'y avait rien, à part un vieux placard mural fixé au mur gris et un lit sur lequel il y avait un gros sac de paille pour matelas: la célèbre paillasse disparue qui faisait dire que l'on couchait sur la paille humide des prisons» (1).
Rejet. Vendredi, sa treizième demande de libération conditionnelle était examinée, en appel, par la juridiction nationale créée par la loi du 15 juin 2000, qui rendra sa décision le 23 novembre (2). Les douze précédentes avaient été rejetées par les gardes des Sceaux successifs. La dernière l'a été, en première instance, par la juridiction régionale de Douai, dont dépend la prison de Bapaume où il est incarcéré. Malgré l'avis favorable unanime de l'ensemble des membres de la commission d'application des peines, les magistrats ont refusé de laisser sortir celui qui a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'enlèvement et le meurtre de Luc Taron, un enfant de 11 ans, à Verrières-le-Buisson (Essonne), en 1964.
Vendredi encore, pendant l'audience à huis clos où Léger n'était pas admis, l'avocat général s'est prononcé pour son maintien en détention. «Le ministère public invoque une raison qui ne l'a jamais été jusque-là: le projet de sortie de mon client ne serait plus cohérent»,