Cette année, la première nuit du ramadan tombait au deuxième jour du beaujolais nouveau. A Couronnes, point de jonction des XIe et XXe arrondissements parisiens, au confluent d'une capitale «bobo-ethno-chic» (celle de la rue Oberkampf) et de cités «sensibles», la fête du beaujolais qui se tenait vendredi au bistrot Chez Mireille fut très arrosée. Très gauloise et décoiffante pour ceux qui débarquaient dans le quartier alléchés par l'«ambiance ramadan», Antoine et ses amis des Beaux-Arts venus exprès du VIe arrondissement pour manger une chorba (soupe traditionnelle): «C'est authentique, pas ce business déprimant qu'on a avec notre Noël.» A Paris, le ramadan est devenu un alibi de la vie cultureuse et branchée, qu'il rythme de soirées orientales; à Couronnes, il a saisi le quotidien. «Moi je sous-loue mon parking à un monsieur qui a son bureau ici, on ne peut plus se garer», se félicite un locataire, serbe, des HLM.
Foule barbue. Pour affronter leur café du matin, les habitués de Chez Mireille doivent percer la barrière de voitures qui stationnent en quadruple file, les étalages de menthe, pois chiches et pâtisseries, les processions qui serpentent de la boucherie musulmane du haut jusqu'à la Bague de Kenza, sublime pâtisserie de la rue Saint-Maur, et une autre foule, barbue, en calotte blanche et grande robe grise, vibrionnant autour de la dizaine de librairies islamiques ayant ouvert récemment. «Avant, on savait par les voisins que c'était ramadan. Là, c'est l'explosion, on