Tribunal correctionnel
de Draguignan, juge unique
Sur le mur de la salle d'audience, une fresque affreuse porte la noble devise: «Tout homme est présumé innocent.» Justement, le juge fait la leçon à la procureure à propos d'un prévenu: «Jusqu'à preuve du contraire, monsieur est innocent, et c'est au ministère public d'apporter la preuve contraire. On ne peut quand même pas le condamner au bénéfice du doute.» L'affaire est embrouillée. Emmanuel est accusé par l'ex-maîtresse de son père de l'avoir menacée d'un couteau et frappée à coups de casserole. Après une dispute avec son amie, le père avait appelé le fils à la rescousse pour déménager. Emmanuel est arrivé au milieu de la nuit avec sa mère. L'avocate de la victime raconte: «Ma cliente a été réveillée en sursaut par les coups et elle a entendu la mère crier: "Tu l'as... Achève-la!" Elle a pu s'enfuir chez une voisine. Maintenant elle vit dans une angoisse terrible.» La procureure réclame un an avec sursis. L'avocate d'Emmanuel est venue de Paris, comme lui. Elle plaide longtemps: «Je suis très étonnée, les gendarmes étaient sur les lieux et il n'y a rien! Ni enquête, ni interrogatoires, ni confrontation.» De temps en temps, le juge fait «oui, oui». Et quand elle annonce: «Je vais revenir sur les éléments donnés par la partie civile», il l'arrête: «Il faut aller à l'essentiel, ne pas lasser le tribunal, c'est contre-productif!» Sur leur banc, les avocats de Draguignan s'énervent: «Elle est beaucoup trop longue!» Le juge obser