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Libération

Un combat judiciaire comme «psychothérapie»

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Mohamed Garne n'a découvert la vérité sur sa naissance qu'en 1991.
publié le 23 novembre 2001 à 1h42

Parfois, Mohamed erre des jours et des nuits dans Paris, se taillade le torse et les membres au rasoir avant d'échouer à l'hôpital. Il se dit «français par le crime», depuis que sa quête de paternité l'a amené à découvrir les circonstances de sa naissance. Depuis des années, il vit au rythme des rebondissements juridiques de son affaire. Et attend comme une délivrance la reconnaissance de son statut de victime et de ses souffrances. «C'est comme une psychothérapie, ça m'enlève un poids», soufflait-il hier, en sortant de l'audience. «Il est habité par des sentiments de malchance, d'horreur, de non-sens. Il se sent dévalorisé, différent de ceux qui ont leurs vrais parents et qui peuvent se montrer au grand jour», décrit le psychiatre Louis Crocq.

Rachitique. Sa mère Kheïra, il l'a retrouvée dans un cimetière algérois, en 1986. En vie. «Les morts ne font pas de mal», dit-elle pour justifier de s'être installée là, dans une sorte de caverne au milieu des tombes. Les vivants ne l'ont pas ménagée. En août 1959, quand le général Challe bombarde le massif de l'Ouarnessis, Kheïra a 16 ans et son mari, Abdelkader Benchouga, l'a répudiée après six mois de mariage. Elle est terrorisée par les bombes et se réfugie dans un arbre calciné. C'est perchée là que des soldats français la découvrent et l'amènent au camp de regroupement de Theniet-el-Had. Elle y est violée le soir même. Puis les jours suivants. Et pendant des mois. Les coups pleuvent lorsque sa grossesse devient visible et dérange