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Libération

«C'est à nous de diriger le débat».

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publié le 30 novembre 2001 à 1h46

D'ordinaire, on ne les entend pas. Alors qu'ils sont les premiers intéressés, eux, ces handicapés à qui l'arrêt Perruche a posé le principe d'un «préjudice à être né». Comment leur donner une parole? Pour Danielle Moyse ­ philosophe et professeur associé au Centre d'études des mouvements sociaux ­ et Nicole Diederich ­ sociologue ­, tout a commencé par une déclaration de représentants de handicapés, prononcée en 1994 lors d'un colloque à Bruxelles: «C'est à nous, personnes atteintes de ces affections (comme le spina-bifida, la dystrophie musculaire, ndlr) que certains suggèrent d'éradiquer génétiquement, qu'il appartient de diriger le débat.»

Appel. Un véritable déclic. D'autant que les deux chercheuses avaient été confrontées à des réactions d'hostilité de handicapés vis-à-vis du diagnostic prénatal (DPN). Alors elles ont diffusé un «appel à témoignages» dans la presse spécialisée. Pour aller plus loin. Voir s'il s'agissait de réactions isolées, savoir si les handicapés vivaient les nouvelles techniques de DPN comme un progrès ou comme une invalidation de leur vie...

Résultats: 50 réponses, trois ans d'enquête et de rencontres et un ouvrage passionnant (1). «Dans leur majorité, ceux que nous avons rencontrés vivent la sélection prénatale comme une violence à leur égard, explique Danielle Moyse. Mais attention, ils ne jugent pas les parents qui y ont recours, ils comprennent leurs contraintes. Ce qu'ils contestent avec virulence, c'est le triomphalisme scientifique, un certain