Marc Rohmer est principal du collège de Bourtzwiller, l'un des quartiers dits sensibles de Mulhouse (Haut-Rhin). Malgré un réseau très dense de relations établies depuis des années avec le tissu associatif, la municipalité, la police et la justice, il a observé depuis la rentrée une aggravation de la situation. Entretien.
A quoi tiennent les brutales ruptures d'ambiance au sein de votre établissement?
Sur le long terme, je sens une extraordinaire mutation. Je vois de plus en plus d'anciens collégiens qui ont des métiers intéressants, des parcours d'insertion normaux, des comportements de plus en plus civils. En revanche, depuis quelques mois, nous subissons une très forte régression, perceptible sur toute la ville de Mulhouse. L'autorité devient illégitime. Il n'y a plus de respect pour les adultes qui représentent l'école ou l'Etat. Les années précédentes, nous pou vions être confrontés à quelques élèves problématiques. Là, ce n'est pas une minorité de desperados, mais des groupes de 80, 100 ou 150 jeunes qui, tout d'un coup, contestent l'autorité.
Pourquoi, et pourquoi maintenant?
Dans un quartier comme le nôtre, où deux tiers des élèves sont issus de l'immigration, il y a des problèmes récurrents: les jeunes récusent leur père, dont le rôle social est dévalorisé, et les autres adultes sont considérés comme illégitimes car l'image paternelle est fragile. Il nous est néanmoins possible d'établir des liens de confiance, mais le collège n'est pas